Histoire

A lire

Un roman de Christian Signol dont voici un extrait :" Elle préférait la sécurité de son petit chalet, de son balcon de bois d'où elle apercevait le clocher, la forêt de la Loubière, Valchevrière, les hautes crêtes qui retombaient vers Corrençon"  Titre : Cette vie ou celle d'après.

 

Mis à jour 15/03/2016 10:43 - Crée le 09/06/2005 00:00

Le Vercors et Valchevrière

Le Vercors et Valchevrière

LE VERCORS

En raison des falaises calcaires qui ne laissent que des passages difficiles, voire dangereux et de toute façon inaccessibles aux véhicules à roues, au 18e siècle on ne circule qu'à pied ou à cheval, les chemins n'étant pas praticables pour les attelages. A cette époque, le Vercors est la région la plus pauvre des Alpes du Nord. A quoi bon cultiver des terres si on ne peut en commercialiser les produits ? Les terres sont en friches, mais la forêt est pillée par des hommes décidés à survivre en vendant quelques charges de mulet.
 
Pour desservir les communes, il existait quelques chemins muletiers : le Pas de l'Allier communiquait avec Pont en Royans. Il y avait aussi un chemin passant par la gorge des Grands Goulets : l'endroit le plus resserré était desservi par un pont, depuis le 14e siècle. Faute d'entretien au 18e siècle le pont avait disparu. On l'avait remplacé par un "écharasson", un tronc de sapin auquel on a laissé des moignons de branches pour servir d'échelle afin de descendre jusqu'au torrent.
Il existait aussi depuis le 14e siècle un chemin de Die à Grenoble qui, après la vallée de la Vernaison, traversait Saint Martin et Saint Julien pour gagner Villard-de-Lans par la Balme et le pont de Valchevrière qui existait dès 1318.
On pouvait l'abréger en prenant à Tourtre le chemin du Pas de l'Ane et celui du Pas de la Sambue.
Le Pas de Saint Martin semble lui aussi fort ancien, des marches y ont été taillées pour faciliter certains passages, ainsi que le Pas du Fouillet à Saint Julien. Beaucoup de ces chemins existent encore et sont balisés pour la randonnée.

VALCHEVRIERE - Village montagnard
(Texte communiqué par la maison du patrimoine de Villard-de-Lans, exposition "Valchevrière.Histoire originale)

DES PAYSANS RIVES A LEUR TERRE

Village sans notaire, médecin, épicier, maréchal ferrant et autre rebouteux, VALCHEVRIERE offrait pourtant à ses habitants la possibilité de vivre sur place.
Au quotidien - on le suppose depuis toujours-  la vie des Vâchorins fut étroitement liée aux éléments naturels : Soleil, Terre, Eau , Forêts. De grandes parcelles de terre, aujourd’hui totalement couvertes de forêts, furent défrichées et consacrées à la culture du seigle et de l’avoine, transformés en farine sur place – un témoignage nous informe que, durant la 1ère guerre mondiale les habitants allaient chercher leur farine à St Marcellin ce qui leur « coûtait » 4 jours de voyage - .
Pommes de terre, choux, haricots, fromages de chèvre et bleu - qui ne s’appelait pas encore du Vercors- pommes, prunes, miel – des ruches en bois de frêne ont été retrouvées au dessus de la ferme GERBOUD – quelques noix, lentilles, salaisons, œufs, volailles, lapins, viande de génisse et de veau se trouvaient à portée de main de chaque paysan pour nourrir sa famille…sous réserve qu’il ait eu le courage de labourer, semer, récolter, engranger et élever. On peut supposer que, dans l’ordinaire, la Bourne étant assez près, les truites et écrevisses étaient présentes sur les tables.

Avant la grande réforme forestière du milieu du XIXème siècle les troupeaux de chèvres occupaient une large place dans l’élevage Vâchorin, la vente des peaux pour la ganterie Grenobloise permettant une rentrée d’argent dans les fermes. Ensuite, le pâturage des chèvres étant interdit sous peine d’une forte amende, l’élevage se poursuivit clandestinement au moins jusqu’en 1917-1920. L’aménagement de ce val en espace cultivable a nécessité de nombreux efforts (irrigation par le biais de petits canaux avec captage de l’eau du Riclaret et de « la source à Clovis », édification de murs de pierres pour soutenir les chemins d’accès et la terre des parcelles cultivées.) Une anecdote rapportée par Paul CHABERT nous éclaire sur la fierté des Vâchorins à vivre dans un tel lieu « là bas » dit-il « ils faisaient le concours du plus gros chou-rave. Certains étaient gros comme des seaux. Et tout cela sans l’aide de fumier, car à Vachorère sans fumier cela faisait beaucoup mieux qu’avec ! » La rudesse de la vie conduisait–elle les Vâchorins à trouver à tout prix des avantages à leur lieu de vie… ? Ainsi prétendaient–ils  que l’eau du RICLARET –le ruisseau du village- avait des vertus « conservatrices.»

CHEPTEL- TYPE D’UNE FERME A VALCHEVRIERE IL Y A 100 ANS

VACHES : de 4 à 10 et principalement de race VILLARDE
TAUREAUX: 1 au moins pour le village
CHEVAUX : 1 au moins par ferme
COCHONS : 2 à 5 achetés souvent à la foire de Pont en Royans
CHEVRES : officiellement 1 ou 2 ( beaucoup plus cachées dans les étables, élevages clandestins)
POULES, LAPINS pour la consommation familiale.

Calcul approximatif de surface à cultiver pour subvenir aux besoins des bêtes et des gens : 

Surface nécessaire par ferme :
- 6 hectares pour les bêtes (fenaisons, pâturages)
- 1 hectare pour les céréales et les légumes
- Soit un total de 7 hectares / ferme

Une moyenne de 10 fermes nous permet d’établir qu’à Valchevrière et ses environs immédiats la surface cultivée était d’environ 70 hectares. Les Vachorins cultivaient la plaine de Château-Julien.

Aujourd’hui on estime à 2 hectares la surface défrichée qui comprend l’emplacement des ruines.
Tout le reste a été « mangé » par la forêt…
  

DES VACHORINS ET DES ARBRES…

Que ce soit pour la faire reculer afin de gagner des espaces à cultiver ou pour prélever le bois nécessaire aux charpentes et autres meubles, la forêt est restée au cœur de la vie des Vâchorins.
Aujourd’hui, si des opérations régulières de défrichage n’avaient pas lieu, la forêt aurait repris sa place en totalité y compris sur les ruines…
Dès l’installation des moines au Prieuré il y a 800 ans environ, la forêt fut « éclaircie », la présence des troupeaux de chèvres des Antonins maintenaient une pression sur les jeunes pousses de résineux –car la chèvre adore croquer les pointes des sapins et épicéas – favorisant ainsi la formation de clairières et dégageant peu à peu l’espace. On peut supposer que l’environnement forestier des moines était constitué de feuillus pour la chauffe et de quelques sapins et épicéas adultes qui avaient échappé au prélèvement destiné à la charpente du prieuré puis à celles des maisons du village. Absolument rien à voir avec l’environnement d’aujourd’hui. La plupart des résineux que vous observez alentour des ruines ont moins de 100 ans…
Les hommes du village prélevait dans leurs forêts le bois nécessaire aux réparations des toits. Ils abattaient à la hache (environ 20 à 30 m3 de résineux par an et par ferme) et débardaient les fûts avec leurs vaches. Les chevaux servaient principalement à traîner la carriole à 2 roues pour aller au bourg, seul « le Père Roche avait un chariot à 4 roues qu’il utilisait pour transporter ça sien » Une scierie était installée à Valchevrière.

A la suite des restrictions concernant le pâturage des chèvres, il y a 150 ans environ, les Vachorins ont perdu une source de revenus et… la forêt a grignoté lentement le territoire puisque les chèvres ne régulaient plus la pousse. Deux incendies au XIXème, la première guerre mondiale qui privera le village de ses jeunes bras puis l’appel du bourg voire de la ville et voilà le décor planté pour sonner le glas de Valchevrière. En 1937 les plantations débutent tout autour du village à l’initiative de Louis BERGER, colporteur qui songe à investir dans les plantations de résineux, à l’endroit même où quelques siècles auparavant les Vachorins s’étaient échinés à ouvrir l’espace…
L’activité de charbonnage a été intense dans le secteur de Valchevrière au moins entre les deux guerres et jusque dans les années 50, se poursuivant après la destruction du village . Jean GLAUDAS achetait le bois sur pieds et employait des charbonniers venus d’Italie pour confectionner le charbon de bois. Ces « carbonari » vivaient là plusieurs mois durant avec toute leur famille. Les échanges avec les habitants du village devaient avoir lieu en dépit de la barrière linguistique ! Le charbon de bois, habituellement mis en sacs par les femmes et les enfants des « carbonari » était ensuite transporté depuis le village jusqu’au pont de Valchevrière en contrebas. Ce transport était effectué par des paysans de Bois Barbu (Chabert, Arribert, Mure-Ravaud) sur des traîneaux de bois à 2 roues tractés par une paire de vaches. Les paysans chargeaient « à bras » jusqu’à 70 sacs de charbons de différentes tailles. Ils étaient payés en litres de vin : 25 litres de vin par jour et par paire de vaches…

témoignage de Paul CHABERT paysan-bûcheron

Une scierie à Valchevrière : Arrantement 28/10/1703
«  sest personnellement establi honnest Pierre Blanc laboureur et habictant a Valchevrière lequel a arrante a Pierre Magnact et Pierre Jalliffier Merlon un jour au chacun de chaque semaine de la scie quil possede au lieu de Valchevrière outre le sabmedi que led Magnat y a estant issi tous deux presant et acceptant et ce pour le temps et terme de six années qui commenceront ala feste de tous les sainctz prochainct et ainsi continuant pandant led arrantem a condiction que lesd rantier jouiront et uzeront de lad scie scavoir led Magnat le lundi et led Merlon le mardi au prix et somme de deux livres….. »

LE DESTIN TRAGIQUE DE VALCHEVRIERE

L'histoire du petit village de Valchevrière ne se résume pas à sa fin brutale en 1944. Elle ne se résume pas non plus à un fait d'armes célèbre dans l'épisode de la Résistance en Vercors. Le village a vécu les péripéties de bien des petits villages : incendies dévastateurs et répétés (1850 et 1864) installation de l'école du village (1882), construction du pont de Valchevrière sur la Bourne et de la route (1890). Le déclin du village s'amorce au début du XXe : à partir de 1921, les jeunes quittent le village.

Le dernier épisode vient clôre brutalement l'histoire de Valchevrière. En juillet 1944, pendant la seconde guerre mondiale, les Allemands décident de réduire les forces du Vercors qui se manifestent de surcroît très ostensiblement : on n'hésite pas à narguer l'occupant en hissant le drapeau national à Saint-Nizier, visible de tout Grenoble. Le Vercors est donc pris d'assaut par le Nord via St-Nizier. Le but pour les troupes ennemies de St-Nizier est donc d'opérer la jonction avec le sud pour nettoyer toute trace de résistance en Vercors. Les ponts sur la Bourne étant détruits, le seul itinéraire est la petite route forestière qui passe par Bois Barbu pour redescendre sur Saint-Julien-en-Vercors. Sur cette route se trouve Valchevrière, surplombé par le belvédère. Les groupes de résistants rescapés de St-Nizier vont tenter un arrêt dans ce secteur, notemment sur le belvédère. Cet épisode est très connu, et relaté dans nombre d'ouvrages relatifs à la résistance en Vercors. Très inférieurs en nombre et armement, les hommes du lieutenant Chabal, submergés par les Allemands qui les ont contourné par le dessus, vont se sacrifier en tirant jusqu'au bout. En représailles les Allemands détruisent le village, à l'exception de la chapelle qui semble aujourd'hui veiller ce cimetière de ruines.

 

 


 

 

 

 

 

 


Le belvédère au-dessus de Valchevrière

 

 

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