Fonte des glaces - conséquences

Une gigantesque fissure, apparue dans l’une des principales barrières de glace d’Antarctique, s’est dramatiquement agrandie au cours de ces derniers mois. Les risques sont importants: un énorme bloc de glace, aussi grand que le département de Seine-et-Marne, pourrait bientôt se rompre et se détacher.

Si une telle chose devait se produire, les conséquences seraient importantes : cela pourrait accélérer la rupture de la barrière de glace, à la manière d’un bouchon que l’on ferait sauter d’une bouteille de champagne. En effet, cette chape de glace retient certains des glaciers de l’inlandsis (la partie interne de la calotte polaire) de se déverser dans l’Océan. Le résultat à long terme, selon les estimations des scientifiques, serait une hausse du niveau global des océans de 10 centimètres.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ces fontes impressionnantes ne sont pas qu’une question de survie des ours polaires. Ce sont des données vraiment inquiétantes. En effet, la fonte des glaces a des conséquences très importantes sur l’éco-système global, sur les courants marins, sur la composition des eaux océaniques… Si la fonte de l’Antarctique se confirme dans les années à venir, ce sont potentiellement 30 millions de km3 de glace qui seront menacés de fonte.

Si la totalité de ces glaces d’eau douce fondait, le niveau de la mer monterait de près de 60 mètres. Mais ce n’est pas tout : la fonte des glaces, que ce soit en Arctique ou en Antarctique pourrait (en conjonction des autres perturbations climatiques) modifier les cycles océaniques : plus d’évaporation en haute mer, donc des risques météos plus importants, diminution de la salinité des courants, notamment des eaux de surface de l’Atlantique Nord…

Une perturbation durable des courants océaniques et des cycles de l’eau affecterait nécessairement les sociétés humaines, avec une augmentation de l’incidence des inondations, mais aussi un bouleversement de la circulation des masses d’air, donc de la probabilité de tempêtes et d’évènements météo extrêmes.

Les dernières données satellitaires concernant la fonte des glaces en Antarctique montrent que le processus est plus complexe que ne le pensaient les climatologues. Alors qu’une partie du « paradis blanc » de Michel Berger est restée stable, une autre fond à un rythme accéléré.
Quel sera l’impact du réchauffement climatique sur les calottes polaires ? Curieusement, la question agite toujours le milieu de la climatologie. Selon certaines simulations numériques, l’épaisseur de la couverture de glace en Antarctique devrait augmenter, même si une réduction de la surface occupée par celle-ci devrait se produire au cours du XXIième siècle. De fait, en 2005 une étude portant sur l’augmentation des précipitations neigeuses dans la partie Est de l’Antarctique semblait donner raison aux modèles numériques. Le rapport du Giec de 2001 concluait d’ailleurs déjà dans le sens d’une augmentation de la calotte polaire de l’Antarctique.
 
D’après une étude publiée dans Nature Geoscience, si la partie Est de l’Antarctique serait bien restée à peu près stable, il n’en serait pas de même de la partie Ouest. Le bilan général montre alors une fonte globale de l’Antarctique, malheureusement en train de s’accélérer, au moins dans la partie Ouest.

Les cercles indiquent la perte de masse (rouge) ou le gain (en bleu) dans les grands bassins. Les chiffres indiquent des gigatonnes par an. 
Crédit : Nature Geoscience

L'eau perdue en Antarctique : trente fois la consommation de la Grande-Bretagne
 
Les chercheurs ont utilisé une technique d’interférométrie radar à partir de satellite pour mesurer précisément la vitesse d’écoulement des glaces. 85 % des côtes de l’Antarctique ont ainsi été étudiées à trois reprises, en 1996, 2000 et  2006. Le résultat est venu confirmer une précédente étude effectuée en 2006 sur une échelle de temps plus courte à partir de mesures gravimétriques.
 
La partie Ouest de l’Antarctique aurait ainsi perdu 132 milliards de tonnes de glace en 2006, soit 83 milliards de plus qu’en 1996. Pour se faire une idée du volume d’eau ainsi perdue, le professeur Jonathan Bamber, l’un des auteurs de la publication de Nature et professeur à l‘Université de Bristol,  le compare à celui du volume d’eau  consommée en Grande-Bretagne : « 4 milliards de tonnes de glace, c’est assez pour fournir de l’eau potable pendant un an au pays ».
 
La part la plus importante de la perte de masse de l’Antarctique se situe au niveau de la mer d’Amundsen et de la partie nord de la péninsule antarctique, qui a ainsi perdu 60 milliards de tonnes de glace en 2006. Or, il se trouve que ces pertes sont fortement corrélées à une accélération de l’écoulement des glaciers à ces endroits. Il semblerait donc que l’écart entre la prédiction des modèles numériques et les observations soit dû à une mauvaise compréhension de l’influence de la dynamique des glaciers sur le taux de fonte des glaces.
Les auteurs ne se prononcent pas vraiment sur l’évolution future du taux de fonte de l’Antarctique dans les décennies à venir, bien qu’ils envisagent un possible ralentissement dans un futur proche. En tout cas, ces dernières années, s'ils ont raison, le taux de fonte s’est accru de 75 % par rapport à 1996.

Sources : Laurent Sacco, Futura-Sciences

Une équipe anglo-américaine révèle dans la revue Science que les glaciers côtiers de la péninsule antarctique ont perdu du terrain au cours des cinquante dernières années.

Les chercheurs du British Antarctic Survey (BAS) et de l'U.S. Geological Survey (USGS) ont analysé plus de 2000 photographies aériennes prises entre 1940 et 2000 ainsi qu'une centaine d'images satellites datant des années 1960 à nos jours. Cela a permis d'établir une cartographie avec une résolution de l'ordre de la trentaine de mètres et une précision de localisation de l'ordre de 130 mètres.

Sur les 244 glaciers étudiés, 87% ont reculé de 600 mètres en moyenne depuis les années 1950 (les autres, irrégulièrement répartis, ayant faiblement progressé), à un rythme qui s'accélère de 50 mètres par an depuis cinq ans. En fait, de 1945 à 1954, 62% de ces glaciers étaient en progression, mais la tendance a changé à partir de 1954 pour atteindre un taux de retraite de 75% en 2004 (ces pourcentages reposant sur des variations moyennes calculées avec 95% de confiance).
 
L'Américaine Jane Ferrigno et ses collègues ont par ailleurs noté une très nette différence suivant l'emplacement des glaciers, ceux situés dans la partie Nord de la péninsule (plus chaude) étant les plus touchés par la fonte. Plus précisément, si l'on considère les isothermes à -5°C et à -9°C tels que connus en 2000, les glaciers situés dans la zone la plus froide n'ont pas varié, ceux situés entre -5°C et -9°C ont diminué, tandis qu'il n'y en a pas dans la zone la plus chaude (au-delà de -5°C).

Cette distribution particulière induit un lien avec le réchauffement atmosphérique qu'a connu cette zone depuis 1950 (+2°C), mais l'équipe reste prudente et ne souhaite pas faire de ce réchauffement l'unique responsable du recul des glaciers (d'autant qu'un ralentissement du recul dans certaines zones entre 1985 et 1994 ne correspond à aucun refroidissement relatif).
Les mécanismes de réponse de ces monstres de glace aux changements climatiques sont en effet complexes et d'autres paramètres doivent encore être pris en compte, comme la température des océans et l'importance des précipitations. Il n'en reste pas moins une conclusion claire : le recul des glaciers antarctiques s'avère supérieur à ce que l'on estimait.

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