Expressions anciennes 1

Les « pots de vin » et l’argent « liquide »
Au Moyen Âge, lorsqu’on versait un « pot de vin », on ne le faisait pas autrement qu’en « liquide ». L’expression qu’on utilise aujourd’hui pour décrire une somme illégalement perçue par une personne influente était courante dans le vocabulaire médiéval. Mais elle s’entendait alors dans son sens littéral, puisqu’on corrompait son dignitaire avec des cruches ou des jarres de bon vin.

Porter un toast
La tostée est une tranche de pain grillé placée au fond d'une coupe de vin qui circulait d'un convive à l'autre en l'honneur de l'invité. Celui qui vide la coupe en dernier peut avaler la tostée. Comme cette coutume a émigré en Angleterre au 12ème siècle le mot s'est anglicisé pour revenir en France au 18 ème siècle sous la forme que nous lui connaissons de nos jours.

Faire la foire, (c’est la fête)
Comme au Moyen Âge les foires se tenaient les jours de fête, on a pris l’habitude d’utiliser le même mot (foire) pour désigner un jour de congé et un jour de fête. Le mot latin feriæ qui désigne les jours consacrés au repos et dont dérive notre expression " jours fériés " est aussi à l’origine des mots « foire » en français, « fair » en anglais, « ferie » et « fiera » en italien, « feria » en espagnol, et « feier » en allemand.

À la queu leu leu
Aujourd'hui l’expression signifie «l'un derrière l'autre».
Leu est la forme ancienne du mot loup (parfois lou). A la queue leu leu devrait donc se lire "à la queue du loup, le loup".
Au Moyen Age, les loups étaient très nombreux et se déplaçaient en bandes, souvent l'un derrière l'autre. Leur apparition était redoutée par la population.

A tour de rôle
À l'époque médiévale les édits étaient écrits sur des parchemins volumineux n'étant pas reliés mais roulés autour d'une tige de bois, d'où leur nom de volume (du verbe latin «volvo», je roule) ou leur nom de «rôle».
Le «rôle» deviendra le registre sur lequel étaient inscrites dans l'ordre les affaires qui devaient passer devant un tribunal, chacune «à son tour de rôle».

Avoir un nom à coucher dehors
À l'époque médiévale, les personnes étaient jugées et classés dans les auberges selon leur nom. Les aubergistes de ce temps se fiaient sur celui-ci pour accommoder ou nom les clients.
Ainsi, ceux qui avaient des noms de famille nobles pouvaient avoir accès à des chambres dans l'auberge alors que d'autres ne pouvaient pas. Ainsi selon son nom on pouvait refuser une personne d'où est née l'expression «avoir un nom à coucher dehors».

Avoir plusieurs cordes à son arc
Expression du 13e siècle où l'archer n'avait, à l'époque, que deux cordes à son arc. Le sens de l'expression est : avoir divers moyens d'action, plusieurs types de ressources,
pour parvenir au résultat.

Aller au diable vauvert
À l'époque médiévale cela signifiait s'engager dans une expédition dangereuse. Cette locution s'entend particulièrement aujourd'hui dans le sens de aller chez le diable, partir en cavale. Le château de Vauvert ou Val-Vert situé près de Paris, du côté de la barrière d'Enfer, avait été habité par Philippe-Auguste après son excommunication ; il passait depuis cette époque pour être hanté par des revenants et des démons.  Aller au diable vauvert prends donc tout son sens.

Avoir maille à partir
Avoir un différend, être en conflit, être en contestation avec quelqu'un.
La maille dont il est question ici est une monnaie, la plus petite qu'il existait sous les Capétiens alors que partir signifiait partager. On ne pouvait donc pas la partager. Ceux qui devaient le faire finissaient toujours par se disputer. Aujourd'hui, l'homonymie entre maille (monnaie) et maille (tricot) et partir (partager) et partir (s'éloigne, s'en aller) a permis à l'expression de subsister.

La roue de la fortune
Symbole de la destinée humaine, on représentait en effet la Fortune sous les traits d'une déesse actionnant une roue. Tout en haut de la roue, siègent les rois et les puissants du jour. Tout en bas, les mendiants sont précipités dans le vide. Entre, ceux à qui le destin est favorable s'élèvent peu à peu, tandis que de l'autre côté tombent les malchanceux en disgrâce. Cette image figure très souvent dans les enluminures des manuscrits. Beaucoup de chansons médiévales y font allusion. L'expression " la roue tourne " fait allusion aux vicissitudes de la vie et aux échecs qui suivent parfois les grands succès.

Dans son for intérieur
Le forum désignait la place publique. Au Moyen Age, le mot pris le sens technique de juridiction et surtout juridiction ecclésiastique (pouvoirs de l'Église, en matière de justice, et leur étendue.) On distinguait le for intérieur (l'Église pouvait sanctionner les fautes commises par le biais de la confession et des pénitences), du for extérieur (toutes les affaires touchant à la religion, de près ou de loin, étaient jugées par des tribunaux ecclésiastiques). La distinction changea peu à peu de sens avec les siècles : for intérieur étant notre conscience qui nous juge, le for extérieur, les institutions, juges et tribunaux.

Avoir voix au chapitre
Être consulté, avoir le droit d'exprimer une opinion.
Le chapitre est l'assemblée des moines ou des chanoines lorsqu'ils se réunissent pour discuter de leurs affaires. Les moinillons, les serviteurs n'avaient pas le droit de parler donc pas voix au chapitre.

Découvrir le pot aux roses
Sens : découvrir le fin mot de l'histoire, le secret, la réalité cachée.
Expression très ancienne dont on ne connaît pas la véritable histoire.
Soit pot à fard à joues : Le trouver suppose qu'on connaisse bien la femme qui le possède et qu'elle n'ait plus de secret à cacher.
Soit essence de rose - produit rare et précieux dont les parfumeurs auraient soigneusement dissimulé les procédés de fabrication. Le pot aux roses serait l'appareil permettant de distiller ce parfum de luxe.
Soit une poudre produite par les alchimistes au cours de l'une de leurs opérations. Ici, le pot aux roses serait la cornue alchimique, objet bien caché s'il en fut.

Faire la nique à
Sens : se moquer de quelqu'un, le narguer.
Au Moyen Age, nique indiquait un signe de mépris qui consistait à lever le nez en l'air avec impertinence.

Prendre des vessies pour des lanternes
L'expression est ancienne, puisqu'on la trouve dès le 13ème siècle. Il s'agissait d'un calembour : en ancien français, vessie et lanterne avaient à peu près le même sens figuré : une lanterne était un conte à dormir debout et une vessie une chose creuse, une bagatelle. La sottise de celui qui prend des vessies pour des lanternes n'est donc pas de confondre deux objets très différents, mais d'accepter une ânerie plutôt qu'une autre ! Quoique de forme voisine, une lanterne et une vessie sont néanmoins des objets fort différents et les confondre est depuis longtemps considéré comme la pire des méprises. (Les vessies dont il est question ici sont des vessies de porc: gonflées d'air, elles pouvaient servir de ballons ou bien, vides, de sacs étanches.)


L'habit ne fait pas le moine
Un des plus anciens proverbes de la langue française.
Sens : il ne faut pas se fier aux apparences qui sont souvent trompeuses.
Les gens du Moyen Age avaient horreur du mensonge et de l'hypocrisie. Chacun devait avoir l'air de ce qu'il était vraiment. Les costumes indiquaient de façon précise le rang social de chacun.

C'est une autre paire de manches
C'est une autre affaire.
Au Moyen Age, les manches des vêtements n'étaient pas toujours cousues de manière définitive, mais simplement ajustées au dernier moment avec des rubans,des lacets ou des attaches. Les dames pouvaient, en gage, remettre leur manche à leur chevalier qui l'arborait alors à sa lance ou à son écu lors des tournois.
Ce gage amoureux est devenu symbole d'engagement au point qu'on en ait oublié son origine aristocratique et galante

Mettre la table
Expression quotidienne qui nous est familière mais incorrecte. Il faudrait dire " mettre le couvert ", puisque nos tables ne voyagent plus dans la maison. Au Moyen Age, les pièces n'avaient pas, comme aujourd'hui, des fonctions très distinctes et la même salle pouvait servir de pièce commune, de salle à manger et de chambre. Aussi, le plus souvent, on " mettait la table " à l'heure des repas, c'est-à-dire que l'on apportait une grande planche et des tréteaux. D'où l'usage, chez les seigneurs, de belles nappes destinées à cacher la pauvreté de l'installation.

Mettre sa main au feu
Affirmer énergiquement quelque chose, au point d'y risquer sa main rappelant les lointains jugements de Dieu de l'époque médiévale. Lorsqu'un accusé ne pouvait faire la preuve de son innocence,  On pouvait lui plonger la main dans l'eau bouillante, ou le faire saisir un fer rouge.il pouvait être plongé dans l'eau, pieds et poings liés. S'il surnageait, c'était que l'eau - élément pur et béni de Dieu - le rejetait. S'il coulait comme une pierre, il était innocent... mais parfois noyé ! Innocent, Dieu le protégeait et il sortait indemne de l'épreuve. Le plus souvent, il suffisait que la victime guérisse vite ou survive quelques jours pour qu'elle soit - un peu tard!-innocentée.

Prendre la porte
Cette expression viendrait de la ville fortifiée de Pérouges. La seule porte accessible fût attaquée en 1468. Les habitants avaient disposé derrière cette porte un amas de pierres. La porte enfoncée les assaillants durent se replier sous une pluie de pierre et s'enfuirent en se protégeant avec les morceaux de la porte.
- Au fronton, cette inscription (traduite) :
"Pérouges des Pérougiens, ville imprenable, les coquins de Dauphinois ont voulu la prendre mais ils ne le purent. Cependant, ils emportèrent les portes, les gonds et les ferrures et dégringolèrent avec elles.
Que le diable les emporte !"

 

Tenir le haut du pavé
Occuper une place de choix dans la société. Jadis, il n'y avait pas de trottoirs et les rues étaient légèrement en pente pour que les eaux sales puissent s'écouler au milieu. Les passants qui marchaient près de ce ruisseau risquaient toujours de se salir ou d'être éclaboussés jusqu'aux mollets. C'est pourquoi on laissait par politesse la meilleure place, le long des maisons, aux personnes de qualité. Le privilège n'était pas négligeable car, jusqu'à la fin du 19ème siècle, toute promenade en ville, surtout par temps de pluie, tournait à l'expédition.

Travailler au noir
Au Moyen Âge, les associations de métier réglementaient le travail en exigeant qu'il ne soit effectué qu'à la lumière du jour. Or, certains maîtres, pour augmenter le rendement de leurs ouvriers, les faisaient travailler à la chandelle, une fois la nuit tombée, ce qui était interdit par les règles. D'où l'expression "travailler au noir" pour signifier travailler de façon illicite.

Une cote mal taillée
Estimation approximative, compromis qui ne satisfait personne.
La cotte (qui s'écrivit longtemps cote) était au Moyen Age une tunique qui, si elle était mal taillée, ne convenait à personne.
La cote est un impôt de la fin du Moyen Age. Lorsqu'elle était taillée, elle signifiait établie, répartie entre les contribuables.

Courir le guilledou
Guiller signifiait "tromper" en vieux français. Les " Guillaume " étaient ainsi nommés car ils étaient des trompeurs mais parfois aussi des trompés.
Aujourd'hui, guiller ne survit plus que dans cette expression qui a pour sens : partir à la recherche d'aventures amoureuses.

Promettre monts et merveilles
Faire des promesses mirifiques. Au cours du temps, on a dit aussi promettre la lune... L'origine de cette expression n'est pas anecdotique. Aucun conquérant n'a jamais promis à ses troupes de merveilleux royaumes au-delà des monts comme le fit le général carthaginois Hannibal, qui fit espérer à ses soldats, du haut des Alpes, la possession de Rome. On disait, au Moyen Age, de quelqu'un qui promettait monts et merveilles, qu'il promettait les monts et les vaux (c'est-à-dire les vallées). Dans la suite des temps, par un goût pour la répétition, typique de l'ancien français, l'image a été oubliée et les merveilles ont pris la place des vaux, renforçant ainsi le sens du mot mont. L'ancien français adorait ces couples de mots, de sonorités voisines et de sens proches. Curieusement, beaucoup nous sont parvenus: bel et bien, sain et sauf, sans foi ni loi, sans feu ni lieu, tout feu tout flamme...

Chercher des noises
Quereller quelqu'un souvent pour peu de chose.
Noise signifiait jadis : querelle bruyante, dispute.
Aujourd'hui, le mot noise ne subsiste que dans cette expression.

Un ducat, ça vaut de l’or
Au Moyen Âge, l’argent est… en argent. C’est en effet de ce « vil métal » que sont constituées les pièces de monnaies les plus courantes. La monnaie d’or ne réapparaît en Occident qu’au 13e siècle, sous la forme de florins ou ducats d’or frappés par les marchands de Florence et de Sienne, ou encore d’écus et de louis d’or émis par les rois de France. Ces pièces prestigieuses et convoitées servent surtout aux échanges internationaux.

Croquer le marmot
Attendre, faire le poireau en se morfondant.
Croquer voulait dire " frapper ". Et croquer le marmot signifiait cogner avec impatience le heurtoir de la porte.

Etre sur la sellette
Sens : être exposé au jugement d'autrui, à la critique ou se trouver en position délicate.
La sellette était le petit banc de bois sur lequel s'asseyait l'accusé interrogé par ses juges. Le siège était très bas pour des raisons psychologiques et symboliques. L'accusé se trouvait dans une posture tout à la fois inconfortable et humiliante

Etre à la merci de
être au pouvoir de quelqu'un de telle manière qu'il soit libre de vous accorder sa grâce ou de vous la refuser.
Au Moyen Age, merci signifiait " grâce, pitié " de là les expressions - Crier, demander merci - le chevalier vaincu reconnaissait sa défaite et implorait la pitié du vainqueur. 

 

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